Patrick du Jardin, nouveau défi : populariser les biostimulants



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Retour sur le parcours de Patrick du Jardin, responsable du Laboratoire de recherche de Biologie végétale au sein de la Faculté de Gembloux Agro-Bio Tech.

Patrick du Jardin a rejoint Gembloux Agro-Bio Tech au début des années ’80 et ne l’a pratiquement plus quitté depuis. Aujourd'hui responsable du laboratoire de recherche de Biologie végétale au sein de l’axe Plant Sciences, il a tout d’abord été étudiant à Gembloux. Diplômé bioingénieur en 1986, il s’est ensuite focalisé sur l’étude de la génétique moléculaire des plantes. Après de nombreux voyages, publications et congrès, il poursuit aujourd’hui un nouveau défi : inscrire les biostimulants dans les normes européennes. Il ne délaisse pas pour autant sa mission d’enseignement et estime que le socle de bachelier est une étape primordiale dans la vie d’un bioingénieur.

Cultiver les plantes autrement

Pour sa thèse, Patrick du Jardin a d’abord bénéficié d’une bourse IRSIA (FRIA aujourd’hui) puis s’est vu confier un mandat d’assistant temporaire,  concentrant ses recherches sur l’amélioration génétique des plantes. Bouclée dès 1990, sa thèse l’a conduit à s’intéresser aux OGM végétaux, un sujet qui deviendrait particulièrement sensible quelques années plus tard. Rapidement, il est devenu expert dans le domaine et a régulièrement été contacté par les médias pour s’exprimer sur le sujet. Par ailleurs, il a travaillé au niveau belge puis européen par la biais de l’EFSA, Autorité Européenne pour la Sécurité sanitaire des Aliments, organisme en charge de de l’évaluation des risques liés à l’alimentation. Patrick du Jardin a fini par y occuper la fonction de vice-président du panel d’experts OGM, parallèlement à ses autres charges universitaires. Il a également siégé au sein du comité d’éthique de l’INRA et du Cirad en France pendant de nombreuses années, où les questions de société soulevées par les OGM et d’autres nouvelles technologies ont été étudiées dans un cadre pluridisciplinaire qu’il affectionne particulièrement.

Sur le plan de la recherche, avec ses collègues (notamment Pierre Delaplace et Marie-Laure Fauconnier), il a d’abord beaucoup travaillé sur la physiologie post-récolte (stockage et germination) de la pomme de terre. Vers 2010, il a repositionné ses recherches en s’intéressant à la physiologie des plantes au champ. Pour lui, il était urgent de cultiver les plantes autrement en étudiant l’interaction de celles-ci avec les microorganismes du sol. Pour un meilleur rendement et surtout plus durable, il est primordial de gérer autrement la fertilité de l’agrosystème et de se centrer sur les propriétés physiologiques des plantes dans leurs interactions avec les microbiotes du sol.

Les biostimulants

2012 a été un nouveau tournant dans la carrière de Patrick du Jardin avec ses études sur les biostimulants. Jusque là, les agriculteurs avaient recours aux pesticides et aux engrais pour maximiser leurs récoltes. Avec l’apparition des biostimulants, c’est une nouvelle manière d’envisager la production agricole et maraichère : on applique aux plantes des microorganismes, mais aussi des substances complexes comme des algues ou des acides humiques, qui vont modifier leur physiologie et « booster » leur nutrition ou leur tolérance aux stress environnementaux. Cela ressemble parfois à une sorte de « super vitamine » qui améliore leur tolérance au froid, à la sécheresse etc. C’est également un moyen de développer autrement leur système racinaire, avec de multiples effets agronomiques.

Après les recherches en laboratoire, il était nécessaire d’évaluer les avancées des industries dans le domaine, mais aussi et surtout de définir une législation européenne pour ces biostimulants, alors inexistante. Patrick du Jardin s’est donc investi dans un travail de consultance pour pouvoir présenter un rapport à la commission européenne en 2012. Celui-ci a eu un impact considérable si bien qu’il a beaucoup voyagé et a participé à la publication de différents ouvrages. Il a par ailleurs été le chairman d’un congrès à propos de cette thématique, rassemblant plus de 1.600 participants en 2019. L’étape actuelle est son implication dans la définition avec le Comité Européen de Normalisation (CEN) de standards européens harmonisés, des standards de sécurité et d’efficacité auxquels la mise sur le marché européen de biostimulants marqués « CE » devra se conformer. On peut à ce propos signaler que l’Europe est leader dans ce domaine. Bon nombre de petites et grandes industries ont compris les enjeux de la production de ces biostimulants et sont demandeurs de protocoles qui certifient leur qualité et leurs domaines précis d’action.

Bien entendu, cette nouvelle manière de concevoir la nutrition des plantes dans le contexte d’une agriculture à haute performance environnementale  est répercutée par M. du Jardin auprès des ses étudiants. Il invite par ailleurs régulièrement des experts en la matière dans son auditoire. On l’a déjà souligné, Patrick du Jardin accorde une importance majeure à l’enseignement et il estime que les étudiants de Gembloux se sont bien débrouillés lors cette crise sanitaire. Lui-même a renforcé de nouveaux modes de communication, comme beaucoup de ses collègues, et il estime que les étudiants d’aujourd’hui sont tout à fait aptes à « jongler » avec plusieurs supports. Cela n’enlève en rien à la richesse de la communication en présentiel qui doit rester un support de base.

Sur le campus, le chercheur se réjouit de pouvoir s’appuyer sur un outil tel que le Jardin botanique, dont il assure la direction au sein de la nouvelle plateforme Wasabi ; un outil qui va encore être enrichi et popularisé dans les mois à venir. Car « connaître les plantes c’est d’abord les appeler par leurs noms » , insiste-t-il enfin.

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